Toucher, si je veux

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• Approcher la main d’un feu de cheminée
• Marcher pieds nus sur le plancher
• Tremper un doigt dans la crème fouettée…

À chaque instant ou presque, le monde est à notre portée.

Les tactiles sont des êtres timides. Ils n’osent pas dire qu’ils ont besoin de lire et comprendre le monde avec le toucher.

Depuis leur naissance ou presque, ils comparent la rugosité d’un tronc d’arbre avec le velouté d’une tenture. Ils passent la main sur un tapis de mousse. Ils se déchaussent sur le sable. Ils trempent un bras jusqu’au coude pour recevoir le courant d’une rivière.

Ils caressent la fourrure du chat, si celui-ci se laisse faire. Ils malaxent la pâte à modeler. Ils s’assoient sur un ballon de Pilates, puis éprouvent leurs muscles en jouant avec l’équilibre.

En ville, ils touchent le verre, le bois, le métal, le cuir. À la campagne, ils laissent une coccinelle se balader sur un bras, jusqu’à capter un chatouillis.

Au risque de passer pour des êtres primitifs, ils remuent la terre à pleines mains avant de semer au jardin. Ils attrapent les mets en oubliant fourchette et couteau. Ils osent peindre au sol avec les pieds.

Ils rêvent de s'offrir une nage naturiste pour sentir l’eau glisser sur tout le corps. Ils exaucent leur rêve le jour où se découvre un coin de nature sauvage.

Les tactiles sont des êtres pudiques, sensoriels jusqu’au creux d’un genou.

Les tactiles sont des êtres joueurs : ils hissent un bambin sur leurs épaules, puis le laissent griffer leur chevelure.

D’instinct, ils déposent une main sur un front tourmenté.

Dans un accès de paresse, ils s’allongent au sol, puis jouent avec leur tonus musculaire, du sommet du crâne jusqu'aux doigts de pieds.

Les tactiles apprécient les poignées de main ni trop molles, ni trop serrées, juste à point.

Ils ne sont pas naïfs : ils disent non à un toucher inapproprié. À l’inverse, ils caressent une joue ou une épaule sans forcément chercher autre chose.

Ils luttent contre les préjugés : être tactile ne signifie pas multiplier les effusions, jusqu’à se perdre dans les bras de ses proches. Toucher n’est pas fusionner. Une personne tactile fait la différence avec le mot affectivité.

Les tactiles touchent leur corps. Le do-in, ou auto-massage chinois, est une méthode qui relaxe une personne de la tête aux pieds en quinze minutes.

Quand la confiance est là, ils ronronnent dès qu’un toucher riche en bienveillance et respect arrive en cadeau.

Les tactiles sont des gastronomes en massages. Glisser, pétrir, étirer, vibrer, porter, déposer sont inscrits dans leur vocabulaire.

Ils sont sensibles au caractère unique d’une main de masseuse ou de masseur. La main est-elle grande ou petite ? Étroite ou large ? Osseuse ou potelée ? Quelle est sa texture ? Quel est son relief ? Les tactiles sont sensibles à une main vivante, structurée.

À titre privé, ils prodiguent des massages pour le bien-être de leurs proches. Un jour, ils franchiront peut-être le pas : et si je devenais à mon tour masseuse ou masseur ?

Alors, ils - ou elles - apposent leur code de déontologie sur le mur, à proximité de la table de massage. Le toucher prend de la densité. Il s’entoure de valeurs éthiques. Il devient source de bien-être.

• En italien, le mot tatto signifie à la fois toucher et tact.
France Culture met le toucher en ondes.