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Zapper dix mille années


L’humanité a une enfance, mais elle l’a oubliée. Jean-Paul Demoule, archéologue, raconte comment s’est structurée l’espèce humaine à un moment crucial de son histoire.

Aux prémices de l’humanité

Qui a inventé l’agriculture et l’élevage ? Qui a inventé les maisons et les villages ? Qui a inventé les outils, le métal, la roue et le travail ? Qui a inventé les dieux ? Qui a inventé l’art et le design ? Qui a inventé les chefs ? Qui a inventé la guerre ? Qui a inventé les cimetières ? Qui a inventé la domination masculine ? Qui a inventé les migrations ? Qui a inventé les peuples, les ethnies, les nations ? Bonnes questions ! Nous sommes tous des enfants curieux.

. . .Site archéologique inca de Pisac, Pérou. Photo : LouiseUn bébé marche à quatre pattes dans sa chambre. Il tente de se dresser. Il esquisse un premier pas. Il tombe. Il s’enhardit… et se téléporte dix-huit ans plus tard ; par exemple dans un bureau ou une salle d’examen.

À l’échelle de l’humanité, une amnésie de même envergure frappe les femmes et les hommes. Un homme préhistorique au corps velu, une massue à la main, se terre dans une grotte où il peint parfois des animaux. D’un coup de pied au derrière, il se voit propulsé chez les Romains. Soit dix mille années de zappées.

Or, que s’est-il passé dans l’enfance de l’humanité ? Il y a douze mille ans, celle-ci a inventé tout ce qui fonde notre société.

Agriculture et alimentation fondent
une espèce et son organisation

Site Archéologique de Tulum Yucatan au Mexique. Photographe : Mikito.Au départ, Homo marche en forêt. Il chasse. Il pêche. Il cueille les plantes sauvages. Profitant de températures clémentes, il se sédentarise.

Au fil des siècles, il invente l’arc, la pirogue, la roue, le filet. Il domestique des céréales, puis des animaux. Il s’abrite dans des huttes, puis des maisons en terre et en torchis, ou en bois. Il crée des villages.

Puis il se dote de chefs. Il crée un ou plusieurs dieux. Il pratique l’art et la guerre. Il fait l’amour. Il enterre ses morts. Il déménage, puis se fond avec d’autres Homos migrateurs de manière plus ou moins pacifique. Il se soumet. Il se révolte. Il a des angoisses qui expliquent la plupart de ses comportements ; y compris les tensions entre les femmes et les hommes.

Les fondations d'une civilisation sont sous nos pieds, dans les dix mille sites archéologiques qui jalonnent à ce jour la planète.

. . .Site archéologique de Cartier-Roberval, Québec, Canada. Photographe : Huguette Trudel.Or, l’enfance d’Homo ne figure nulle part dans les livres d’histoire.

De plus, le récit officiel épouse le point de vue des dominants : rois, empereurs, tyrans. Nos ancêtres étaient-ils Gaulois ? Faux. Ils étaient Belges, Aquitains, Celtes, eux-mêmes fruits de migrations successives : Arabo-berbères d’Andalousie, Vikings, Tziganes, Morisques, Juifs réfugiés d’Espagne, Bretons fuyant les îles britanniques.

L’humanité progresse-t-elle de manière linéaire, de la pierre taillée à la roue et aux objets connectés ? Faux. Elle ne cesse de tâtonner, au gré de son environnement et de sa curiosité.

Des villes, des empires ont implosé de l’intérieur. Des rois restent nus, tandis que des peuples émigrent et fondent de nouveaux villages, de nouvelles manières de se nourrir et de se parler. L’humanité buissonne depuis des millénaires. Elle cultive le pluralisme. Il n’y a aucune raison pour que l’histoire balbutie. Dans deux mille ans, la nation France ne sera qu’un chapitre dans un manuel d’histoire.

Premières villes il y a 5 000 ans

Site archéologique de Knossos, district d’Héraklion, Crète, Grèce. Photographe : Marie-Hélène Cingal.Jean-Paul Demoule, archéologue, entraîne ses lecteurs dans les sites archéologiques de Lézignan-la-Cèbe dans l’Hérault, dans la grotte de Yuchanyan en Chine, mais aussi en Mésopotamie (Irak aujourd’hui), en Sibérie, en Crète.

Il remonte le temps jusqu’à deux millions d’années, à la rencontre des premiers Homos erectus, ancêtres des Homos sapiens. Il décrit la trame d’une espèce qui a peu à peu imposé sa loi sur une planète, au risque de l’appauvrir, puis de la détruire.

Quand Homo devient paysan, alors son histoire bascule. Fin du nomadisme : de petits groupes s’installent, cultivent le maïs et le blé, affûtent leurs outils, élèvent du bétail, domestiquent le loup pour en faire un chien. Naît l’instinct de propriété avec les premières barricades. Les tâches se spécialisent.

Les premières villes du monde apparaissent il y a cinq mille ans en Mésopotamie et en Égypte.

Apprendre à cohabiter
dans la promiscuité

Rocher du lion de la Citadelle de Sigryia au Sri Lanka. Photographe : François Peyne.Pour organiser une société, un chef émerge. Quand la vie en groupe devient trop compliquée, alors les audacieux repartent à l’aventure.

Un jour, leur migration se heurte aux rives de l’océan Atlantique. À partir de là, l’humanité se développe dans un espace limité.

Jean-Paul Demoule soulève un paradoxe : plus Homo fait des progrès techniques, plus le travail devient harassant. Le chasseur-cueilleur travaillait trois heures par jour pour se nourrir. Dix mille ans plus tard, son successeur possède machines et robots. Il a des impératifs de résultats de plus en plus irréalistes. Il reste connecté à son activité professionnelle jour et nuit par la magie du Wifi. Mieux on est outillé, plus on termine sa journée épuisé.

Histoire buissonnante

Site archéologique d’Ingapirca, Équateur. Photographe : Michele Prudhon.Avec prudence et dans une grande rigueur scientifique, l’auteur démonte quelques mythes tels qu’une prétendue civilisation indo-européenne de laquelle dériveraient les langues et les cultures d’aujourd’hui. En réalité, les groupes humains ne cessent de se croiser et de s’influencer. Les poteries témoignent de mouvements artistiques dont les styles résonnent d’est en ouest.

Après un tel récit, le lecteur se demande si Homo est aussi maître de son destin qu’il l’affirme.

Si les glaciers n'avaient pas libéré une grande partie de l’Europe, Homo serait resté en Afrique. Si les empereurs Ming de Chine n’avaient pas renoncé à poursuivre leur expansion il y a un demi-millénaire, une autre culture aurait prospéré en France.

Connaître son histoire
pour mieux tracer son avenir

Site archéologique du Machu Picchu, Pérou. Photographes : les Flyingshoes.Même notre foi en l’État et en la Nation est à relativiser : son avènement n'a rien d'un long fleuve tranquille. Jean-Paul Demoule note : lorsque les inégalités deviennent excessives, alors les organisations les plus abouties se délitent.

Les chefs ne restent sur le trône que si le peuple y trouve son compte. La servitude volontaire a ses limites.

Ainsi, les « dix millénaireszappés » mettent l’homme contemporain face à ses automatismes, ses habitudes, ses croyances. Ils aident par exemple à comprendre pourquoi, siècle après siècle, l’homme s’est employé à contrôler la femme, submergé par des peurs et des pensées magiques.

D’où la suggestion de l’auteur :
redécouvrir l’enfance de l’humanité
pour couper ses liens.
Mieux vaut choisir son histoire que la subir.

Les dix millénaires oubliés qui ont fait l’histoire. Quand on inventa l’agriculture, la guerre et les chefs, par Jean-Paul Demoule - Éditions Fayard.

Le livre s’organise en 11 questions : qui a inventé l’agriculture et l’élevage ? Qui a inventé les maisons et les villages ? Qui a inventé les outils, le métal, la roue et le travail ? Qui a inventé les dieux et Dieu ? Qui a inventé l’art et le design ? Qui a inventé les chefs et la servitude volontaire ? Qui a inventé la guerre et les massacres ? Qui a inventé les tombes et les cimetières ? Qui a inventé la domination masculine ? Qui a inventé les migrations ? Qui a inventé les peuples, les ethnies, les nations ?

Sur les traces d’Homo sapiens

. . .Site archéologique de Tyr au Liban. Photo : Bagolina. Le plus vieux primate « humain » connu à ce jour a environ 7 millions d’années. Il a été trouvé au Tchad. Les archéologues qui l’ont découvert l’ont nommé Toumaï. Les australopithèques (dont Lucy) sont apparus sur Terre il y a 3,5 millions d’années. Ils fabriquent les premiers outils en pierre. Leur succèdent Homo habilis et Homo erectus, le premier à sortir du continent africain.

Sur une échelle de temps de 7 millions d’années, soit 300 000 générations au minimum, nous n’avons encore découvert les restes que d’un très petit nombre d’individus, dont la totalité, jusqu’à il y a 100 000 ans, tiendrait dans une valise. Trois nouveaux Homo ont été découverts depuis 1990 : l’homme de Florès, l’homme de Denisova et Homo Naledi.

Homo sapiens arrive en Europe il y a 40 000 ans par l’est (Proche-Orient) et par le sud, détroit de Gibraltar (Afrique). Il y a 35 000 ans, il peint des lions, des rhinocéros, des ours, des bisons sur les parois de la grotte Chauvet en Ardèche.

Site archéologique de Tulum Yucatan au Mexique. Photographe : Serge Pinel. Il y a 35 000 ans, Homo sapiens sculpte une première statuette à connotation érotique. Découverte dans la grotte de Hohle Fels dans le Jura souabe, elle est faite en ivoire de mammouth. Elle a des seins et un sexe démesurés. D’autres statuettes épousant la même esthétique ont été trouvées dans le Périgord et en Ukraine. Elles témoignent d’interrogations déjà lancinantes sur la sexualité féminine à cette époque. Les statuettes de femmes nues se multiplient il y a 10 000 ans.

L’homme n’a pas « découvert l’Amérique » en 1492 avec Christophe Colomb. En réalité, Homo sapiens a franchi le détroit de Bering, passant ainsi de l’Asie à l’Amérique du nord, il y a environ 25 000 ans. Il est arrivé au Mexique il y a environ 12 000 ans. Les chasseurs-cueilleurs sont présents au Pérou il y a 6 000 ans.

Les traces des premières habitations « en dur » de l’humanité ont été trouvées dans les plaines glacées de l’Ukraine et de la Russie méridionale. Elles ont 25 000 ans. Leur matière première : des ossements de mammouth.

Site archéologique de Delphes, Grèce. Photographe : Mélanie Mabilon. La plus vieille poterie au monde a 18 000 ans. Elle a été trouvée dans la grotte de Xianrendong, dans la province de Jiangxi, dans le sud-est de la Chine. Il s’agit de récipients en terre cuite.

Il y a 12 000 ans, la planète abritait quelques centaines de milliers d’individus identiques à nous. Ils nomadisaient en forêt par petits groupes. C’était une société d’abondance, au confort certes rudimentaire, qui puisait dans la nature ce dont elle avait besoin. Au XXIe siècle, la Terre compte 7,5 milliards d’êtres humains dont 1 % possède la moitié des richesses, 1 milliard ne mange pas à sa faim, 1 milliard est en surpoids.

Le premier massacre recensé à ce jour a 11 000 ans. Il eut lieu au Soudan, dans la vallée du Nil. Les archéologues ont trouvé soixante corps criblés de flèches dans une fosse. Ils font l'hypothèse d'un raid meurtrier pour annexer une zone au riche écosystème. En France, deux sites montrent des traces de massacres : Culoz et Montardit dans l’Ariège. Là aussi, le motif semble une querelle de territoire. Il y a 5 000 ans, les villages commencent à s’installer sur les hauteurs et à se fortifier.

Site archéologique de Pierre Pamole, Puy de Dôme au nord des Monts du Forez. Photographe : Ricohplio. Les premiers signes d’une agriculture ont 10 000 ans. Ils se trouvent au Proche-Orient. On y cultive le blé et l’orge. On y domestique des porcs, des moutons, des chèvres, des bœufs.

Il y a 6 500 ans, le niveau de la mer était 7 mètres plus bas qu’aujourd’hui car la fonte des glaces n’était pas encore achevée. Il y avait davantage d’îles, en particulier dans la mer Égée, ce qui a facilité les migrations vers l’Europe. Il y a 100 000 ans, en pleine époque glaciaire, le niveau de la mer était 100 mètres plus bas.

Les agriculteurs Homo sapiens arrivent en France il y a environ 5 800 ans par l’est et le sud. En mille années environ, l’ensemble du territoire se couvre de petites communautés agricoles qui déboisent la forêt avec des haches en pierre polie, puis construisent des hameaux de 100 à 200 habitants au milieu de vastes clairières.

Site archéologique Despotikó, archipel des Cyclades, Grèce. Photographe : Pierre Lacour. Les premiers véhicules à roues et les premières charrues, les araires, sont apparus en Eurasie il y a 4 000 ans, soit au moins 5 000 ans après l’invention de l’agriculture et de l’élevage.

Les premiers chefs, les premières hiérarchies apparaissent il y a 4 500 ans avec les premières villes. Indice : dans le cimetière de Varna, sur les rives bulgares de la mer Noire, la tombe d’un homme adulte contenait 1 kg d’objets en or, un manche de sceptre, des bracelets, des pendentifs, des pièces cousues sur le vêtement et la coiffure. Dans les 400 autres tombes, on n’a trouvé que des ossements ; parfois un outil en os ou en pierre.

L’histoire et l’ethnologie montrent que, partout, les chefs manipulent à leur profit le surnaturel pour assurer leur pouvoir. Croire en la force transformatrice d’un chef… jusqu’à nos jours.

Site archéologique d’Ollantaytambo, Pérou. Photographe : Whitey.

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Jean-Paul Demoule est archéologue, professeur émérite à l'université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France. Il a présidé l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), de sa création en 2002 jusqu'en 2008. Spécialiste du néolithique et de l'âge du Fer, il a fouillé en France, en Grèce et en Bulgarie. Il a publié une vingtaine d'ouvrages.

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